top of page
  • Photo du rédacteurFab404

20 ans après, Denis TROCH s'adresse aux supporters!

Dernière mise à jour : 24 mai 2021


Écouter la voix si familière de Denis TROCH, aujourd'hui c'est pour beaucoup d'entre nous ranimer la flamme du jeune supporter que nous étions. L'un des entraineurs les plus marquant de l'histoire de l'ASC a évoqué avec nous le 4 mai dernier son passé amiénois entre 2000 et 2004. Passionné par l'analyse et la construction de ce qui permet de sublimer un individu ou un collectif dans un contexte sportif, Denis TROCH nous a exposé les clés d'une saison "hors norme" en 2000-2001. Fidèle à l'Amiens SC, Denis TROCH a tenu aussi à nous confier ses réflexions sur la situation actuelle du club et sa confiance de revoir l'Amiens SC au plus haut niveau.

Voici l'enregistrement audio de notre conversation puis sa retranscription écrite :

1°) Avez-vous un souvenir en particulier à nous faire partager concernant la saison 2000-2001?

Le moment le plus important, c'était en décembre 2000. Nous étions encore qualifiés pour la Coupe de la ligue (16ème de finale), la Coupe de France (32ème de finale), et, je crois, 7ème à ce moment là en championnat. Et là j’ai senti un peu dans l’équipe mais surtout dans le club et autour du club des moments tendus : "on s’en foutait de la Coupe de France, on s’en fichait de la Coupe de ligue. " et il fallait absolument remonter. Et j’ai ressenti çà un petit peu. Pour ne pas dire beaucoup. Et finalement il y a eu un déclic quand on a joué le dernier match de championnat de l’année 2000 contre Pau. On a perdu, c’était un petit peu tendu pour tout le monde. Et il y a un joueur qui m’a dit à la fin du match, « Coach je vous vois là mais vous croyez en nous ? ». C’était Jean-Paul ABALO. On venait de perdre c’était juste à la fin du match. « Mais bien-sûr j’ai jamais cru en une équipe comme celle-ci » Il me dit « Donc on va aller au bout et on va monter ». Et ça a été pour moi révélateur que si on voulait y arriver, c’était entre nous. Il fallait qu’on se dise les choses entre nous et qu’on avance, dans ce sens là. ça a été un élément déclencheur de quelque chose c’est à partir de ce moment là je me suis dit : Ok C'est bon, on joue sur les trois tableaux et que si les gens soient d’accord ou pas, on s'en fiche, les victoires vont amener les victoires. La médiatisation va nous aider.

Jouer des matchs de haut niveau contre des équipes de L1 si on se qualifie en Coupe de la ligue ou en Coupe de France, ça va nous aider à donner du rythme, et de la consistance à la notre jeu. Et on va avancer de cette façon. On prendra le repos qu'il faut, s'il y en a. Il y en pas eu beaucoup. On a fait ce qu'il fallait pour aller au bout. C’est un moment clé de l’année. Après, bien-sûr la montée, c’est quelque chose d’extraordinaire, la finale de Coupe de France c'est hors norme. Et on a fait cette année là, je crois quelque chose qui n'existe pas, je ne pense pas qu’il y ait une autre équipe qui a réalisé la même année un quart de finale de Coupe de la ligue, une finale de Coupe de France et une montée de national en L2 la même année. Ça c'est hors norme. C'est surprenant. Et ça m’interpelle d'avoir pu courir trois lièvres à la fois, d'avoir réussi ces choses là, la quasi totalité des choses. Réussir la montée oui, quart de finale de Coupe de la ligue en éliminant plusieurs clubs de L1, aller en finale de Coupe de France, tout ça séparément c’était déjà un exploit. Chaque compétition que l'on a appréhendée on a su l’emmener au bout. C'est ce qui est complexe. On a du faire dix matchs de Coupe de France, la saison du championnat, plus cinq matchs de Coupe de la ligue. Pour une équipe comme la notre, c’était quand même une grosse saison en nombre de matchs effectués. On a du marquer cette année là 100 buts dans l’année.

2°) Le club a-t-il prévu de célébrer les 20 ans de cette saison historique?

J'espère que le club fera quelque chose. Nous allons faire quelque chose pour nous, pas besoin forcément du club. Si le club s'associe ce serait magnifique, sinon on le fêtera ensemble avec tous les joueurs.

3°) Avez-vous revu les images de la finale?

J'ai revu la série de tirs aux buts il y a peut-être 2-3 ans. C’est rare que je regarde les matchs après, je préfère garder les souvenirs, je préfère les revivre par moi-même que par les images. On a tendance à embellir les choses donc cela m'arrange de pas revoir la vérité, qui parfois est dure.

4°) Nous avons retrouvé un enregistrement de votre discours à la mairie le 27 mai 2000. Comment avez-vous vécu ce retour à Amiens devant les supporters ?

Oh la la je ne sais plus ce que j’ai dit. Je n'ai pas dit trop de bêtises ? Vous me faites peur! Ah nous avions l'impression d'avoir gagné la Coupe d'Europe! C'était surprenant. Je me disais, on va aller le lendemain midi sur la place de la mairie à Amiens avec un car impérial et il y aura personne, ou alors quelques supporters. Et puis on est arrivé par le centre-ville, on a fait un détour avant d'arriver directement. Et personne dans les rues, je vous assure. deux, trois personnes, mais quasiment personne. Je me disais « Mais qu’est-ce qu’on va faire sur la place de la mairie ? ». C'est seulement quand on est arrivé que j'ai vu la cohue et les milliers de personnes. Car il y avait des milliers de personnes, j'ai dit « Non, c'est pas vrai ? »

C'était trop impressionnant. Autant monde, de personnes! Et là on s'est rendu compte qu'il y avait tous ceux qui étaient la veille au Stade de France, tous ceux qui n'y étaient pas, qui n'avaient pas pu y aller et qui se sont retrouvés réunis sur cette place de la mairie. C'était vraiment une belle communion. Devant la foule, je ne me souviens plus ce que j'ai dit. « Merci », ça c 'est sûr et certain. J'ai peut-être aussi pensé que ce qu’on avait fait était bien. Même si je ne l'ai pas dit, je sais que c'était quelque chose de beau et c'était les prémisses de quelque chose qui pouvait se passer, dans les mois et les années à venir, parce que je pensais qu’on allait monter. Et ça n'a pas été le cas, et ça été fait par la suite, très bien fait par Christophe PELISSIER et son équipe. Mais, c'était déjà donner à ce moment la possibilité aux Amiénois de croire en eux, de croire en leur équipe, en leur club, pour se dire « pourquoi pas nous ? ». On avait à ce moment là créé une brèche vers la réussite. Et là c’était intéressant pour ça.


5°) Pour les supporters, c'était tellement un grand contraste avec l'année précédente et la relégation.

Parfois, il faut tomber bien bas pour bien rebondir, et on a su rebondir après une saison, des mois, et des années un peu disette quoi. A un moment donné, il fallait rebondir, on a eu cette capacité et cette possibilité. On l’a saisi. C'est aussi intéressant et important de le dire, parce que c'est quand même les garçons sur le terrain, ils ont fait ce qu’il fallait, et en dehors le public aussi. On a fait les derniers mois avec un stade à guichets fermés. Incroyable le monde qu’il y avait!

6°) C'est à guichet fermés en effet que l'Amiens SC a obtenu la montée face à PAU par une victoire 2-1 avec des buts d'Emerick DARBELET et Arnaud RIVENET

Ce match face à Pau est important, le match aller et le match retour. Comme quoi, on a un peu de pot de l’avoir vécu !

7°) Que faites-vous aujourd'hui?

Je suis sorti du football depuis 10-12 ans maintenant. J’accompagne encore des équipes ou des joueurs de tout niveau, de L1, Top 14, rugby aussi, handball, cyclistes professionnels. Mais aussi le monde de l’entreprise. Je me sers de tout mon vécu d’entraîneur, de joueur dans le milieu du football pour pouvoir faire ce nouveau métier. Mon actualité aujourd’hui c’est un petit peu compliqué car il y a beaucoup de visio-conférences pour faire des séminaires, des interventions à distance, et aussi des formations, où je forme des gens à faire le même métier que moi. Amener des sportifs à rester au plus haut niveau, des dirigeants d'entreprise à gérer les émotions ou travailler sur la prise de décision. C'est mon quotidien, qui est vraiment très diversifié. C'est vraiment un job hyper passionnant

8°) Souhaitez-vous transmettre un message aux supporters de l'Amiens SC? On se rend compte aujourd’hui que les résultats des équipes à domicile ou à l'extérieur sont faussés par rapport aux années précédentes. Par exemple, le Paris Saint-Germain a perdu 8 fois à domicile. Ce n'est jamais le hasard. Les spectateurs, les supporters ont une incidence sur le match et sur le jeu. Ça veut dire aussi que si l'équipe marque un but. En règle générale, le public de par son accompagnement, de par son engagement, le public va rendre un deuxième but. Si les joueurs font l'effort de marquer un but, le public est là pour amplifier ce résultat et être capable d’aider les joueurs pour en marquer un second. Ça c'est important de le savoir. Quand le public n’est pas là, ça fait défaut et il faut savoir aussi qu’a contrario parfois le public va à l'encontre des joueurs et là ça c'est quelque chose qui m’horripile. Je ne vois pas comment on peut aller à l'encontre de son équipe, ou critiquer un joueur ou un résultat. Parce que je ne pense pas que les joueurs ou les entraîneurs et l’équipe le font exprès d’être mauvais. Et je ne crois pas qu'un seul joueur ou un seul entraîneur a envie de perdre. Donc si c'est le cas, c'est vraiment parce qu'ils n’ont pas cette capacité à réussir, ce n’est pas du tout leur envie. Donc je dis aux supporters, essayons de comprendre ensemble que chacun d'entre nous veut la même chose. On ne peut pas critiquer quelque chose parce que l'on ne veut pas s'associer à la défaite. Personne ne veut perdre. Et encore une fois je dis que quelque soit les joueurs, les dirigeants ou les entraîneurs amiénois, ils veulent tous gagner. Après il y a peut-être des maladresses. Mais surtout il ne faut pas lâcher cette cohésion, cette possibilité de coopérer ensemble pour pouvoir obtenir le meilleur des résultats possibles par rapport au potentiel de chacun. C'est à dire que ce soit celui du joueur, de l'équipe, et du club avec bien sur tout le monde. J'englobe dans cette réussite, d'une équipe ou d'un groupe, non seulement les supporters, les spectateurs, mais aussi les médias.

Je crois que quand on se rend compte qu'il y a par exemple une épopée en Coupe de France, ou en championnat une montée, là tout le monde adhère et on se rend compte que les forces sont démultipliées. Donc essayons déjà de ne pas se disperser. On est supporter même si c'est difficile et il est bon de s'arrêter sur la difficulté pour pouvoir savoir comment faire pour s'en sortir et ne pas montrer du doigt les autres. C'est ça qui est gênant et qui va encore plus donner de bonnes raisons aux supporters parfois de décrocher et de dire « ouais bon allez ils ne courent même pas » mais peut-être qu'ils ne courent plus parce qu'ils n’ont plus cette motivation qui vient aussi de l'extérieur. Je vous dis ça parce qu'aujourd'hui quand on voit les huis-clos, les supporters doivent se rendre compte qu'ils ont un impact considérable. Et donc il faut jouer avec cet impact considérable. Il faut le savoir et ne pas aller à l'encontre. Parce que si on est contre les joueurs, les joueurs n’avanceront pas plus vite. Une fois, mais pas deux, pas trois. On comprend la déception. Je comprends la déception des spectateurs, des supporters, mais à aucun moment j’ai travaillé contre eux, contre l’équipe, contre le résultat, jamais.Parfois y a des gens qui sont plus forme, parfois un peu moins. Vous avez très justement dit que cette année 2000 qui avait précédé la saisons 2000-2001 avait été difficile. Moi je me souviens très bien. La première partie de la saison en championnat, au mois de décembre on était 7ème, je trouvais que le public en avait après les joueurs qui étaient encore là de la saison précédente. Ils n'étaient plutôt pas rassurés sur les résultats. Il a fallu qu'on prenne sur nous pour justement redonner le plaisir et l’envie. Mais on est allé chercher loin. C’est pour ça que je suis très reconnaissant de cette équipe de joueurs, et ensuite dirigeants, et supporters, parce qu'ils sont venus nous assister, nous aider. Mais on a fait un gros gros effort pour pouvoir rebondir après cette descente. Il y a eu une bonne chose de faite. C'est vraiment,ce n’est pas un manque d’humilité, sincèrement quand je dis ça c'est que je crois que vraiment, on méritait quelque chose de bien, et ce n’est pas une vantardise non plus. C'est un fait. Tout le monde travaillait pour l’autre c’était impressionnant. On acceptait que l'autre rate parce qu'on savait qu'on pouvait rater et que l'autre serait là pour nous aider. Il y avait vraiment une entraide. Les interactions entre les joueurs et le staff, on s'auto-protégeait, on s'aidait, on se supportait. Oh parfois on s’engueulait aussi mais ça fait partie aussi de l'évolution. Pour évoluer il faut aussi de temps en temps avoir un différend pour pouvoir, se reconnecter sur un objectif.

(source: aucoeurdelamienssc.wordpress.com)


9°) Vous continuez à suivre l'actualité du club?

Ah ah mais bien sur, bien entendu. Moi j'étais heureux. Je suis allé voir de temps en temps les matchs. J'étais hyper content de la montée en L1, déçu bien-sûr de la descente. Je me suis positionné. Je la trouve vraiment injuste, et moi j’aurais jamais accepté cette injustice. Je ne sais pas comment j'aurais fait, mais je sais que je n'aurai jamais accepté ça. C'est compliqué, on peut dire mais moi je sais que quand il y a une injustice, je le fais savoir et là c'était une grande injustice. Mais c'est comme ça. J’ai aussi supporté, accompagné à ce moment là de l'injustice et aussi l’équipe de Christophe PELISSIER qui est monté en L1. Et moi j'étais super content car j'ai eu l'impression que nous avons fait, pas que nous, les équipes précédentes, cette montée de L1, j'ai envie de penser qu'on a apporté des ressources, des croyances qui permettait à tout Amiénois de penser qu'il pouvait jouer un jour en L1. La ligue 1 n’apportait pas qu’aux autres. En allant en finale de Coupe de France, en battant des équipes de L1 dans les Coupes, en montant d'une division, on a montré qu'on était capable, que les Amiénois étaient capables de faire quelque chose. Et ça quand il y a une brèche qui est faîte, c'est moins compliqué, même si en L1 c'est hyper dur. C'est cet espoir de se dire pourquoi pas nous ? Et voilà les Amiénois l'ont fait. On sait maintenant que la L1 c’est accessible. Alors qu'avant quand j'y étais jamais le club n'avait été en L1, ni en quarts de coupe de la ligue, ni en finale de Coupe de France. Et ensuite en L2 on a échoué plusieurs années de suite. Au cours des saisons en L2 où j'étais là, on a échoué à monter. Il nous a manqué simplement le fait que certaines personnes puissent connaître la L1 pour que tout le monde puisse se dire « P*** ouais mais on peut y arriver! ». Moi la Coupe de France je l'avais déjà gagnée avant. Monter d'une division à l'autre je l'avais déjà fait. On avait déjà des joueurs qui l’avaient déjà fait. C'était moins compliqué d'y arriver quand il y a ces deux-trois personnes. Maintenant le club a connu la L1, le public, les supporters, les dirigeants, certains joueurs, certains entraineurs, et les médias savent que c’est possible de remonter en L1. Donc cela sera moins compliqué dans les années à venir je pense, de monter que ce qui avait été fait avec Christophe PELISSIER. On le souhaite tous !

 

Un grand merci à Denis TROCH qui n'a pas hésité un instant quand nous lui avons proposé d'évoquer ces formidables moments partagés ensemble.

241 vues0 commentaire

Posts récents

Voir tout
bottom of page